Dermatillomanie-moi !
- 15 oct.
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Frédérique était assise au bord de son lit, ses doigts traçaient doucement les marques rugueuses sur ses bras. Devant elle, le miroir renvoyait l’image des cicatrices laissées : une constellation de taches rouge et marron, certaines fraîches, d’autres plus anciennes, presque effacées. Elle savait qu’elle devait arrêter, elle l’avait toujours su, mais l’envie demeurait plus forte que la raison.

Tout avait commencé à ses onze ans : une simple tache, une égratignure par inadvertance, puis une autre et encore une. Au fil des années, ce geste était devenu un réflexe, presque un instinct. Le stress, l’anxiété, l’ennui, la tristesse… ses doigts se dirigeaient toujours vers sa peau, à la recherche d’imperfections à « effacer ».
Elle avait tenté mille solutions : des gants, des jouets qui occupent ses mains, mettre des faux ongles, et même coller des pansements pour ne pas avoir accès aux plaies qu’elle a crée en se grattant, parfois bien trop fort.
Rien n’avait tenu. Ce besoin était bien plus qu’une simple habitude : c’était un malaise profond, un malaise qu’elle n’arrivait pas à nommer et qui lui créait bien des complexes. De plus, l’illusion de soulagement qu’elle ressentait après l’acte, n’arrangeait pas les choses.
Un jour, Anaïs, sa meilleure amie, l’avait surprise en train d’essayer d’enlever la croûte formée sur son nez après l’apparition d’un bouton. « Frédérique, arrête ! Tu te fais du mal ». Pourtant, l’angoisse avait été plus forte que sa volonté de stopper cette forme d’automutilation. Elle grogna, afin de faire part de sa frustration, face aux injonctions qu’elle entendait, depuis des années.
La culpabilité la rongeait tant, elle aimerait vraiment arrêter et pouvoir enfin aimer son corps. Elle serra ses poings et les pressa contre ses genoux, tandis que le silence de la chambre pesait lourdement autour d’elle. Ceci était si énervant, tout ce qu’elle voulait c’était pouvoir résister à ses compulsions.
« Je crois que j’ai besoin d’aide, il est impossible que je sois la seule à vivre cela », pensa Frédérique. Ces mots, bien que jamais prononcés à voix haute, représentaient un premier pas. Après tout, elle avait toujours cru être la seule à se « triturer la peau » sans pouvoir s’arrêter, mais cette situation lui semblait de plus en plus insupportable.
Le lendemain, elle publia un sondage en story sur son compte Instagram professionnel dédié au dessin : « Ça vous arrive aussi de gratter vos plaies lorsque vous êtes stressé(e)s ? »
La majorité n’avait pas répondu oui, mais trente-sept personnes l’avaient admis, ce qui fut déjà un choc pour Frédérique, qui ignorait que d’autres vivaient la même chose. Elle reçut alors un message privé d’une abonnée, à qui elle écrivit : « Coucou, je me permets de t’envoyer ce message, car j’ai vu que tu avais répondu oui au sondage. As-tu l’habitude de te triturer la peau ? »
Deux heures plus tard, elle obtint la réponse suivante : « Oui, je souffre de dermatillomanie depuis déjà cinq ans ».
«Elle souffre de quoi ? », pensa-t-elle, confuse. Elle se hâta de chercher la définition de la dermatillomanie et là, tout prit un sens. Elle n’était vraiment pas la seule à vivre cela en fait…
Fin.
Merci pour ta lecture de Dermatillomanie-moi ! et à très vite.
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